top of page
Rechercher

Quand l’intelligence artificielle menace le cinéma et le doublage

Dernière mise à jour : il y a 1 jour

Date de publication : 10 octobre 2025

Catégorie : Veille technologique, audiovisuel & droit


L’arrivée de Sora 2, nouvelle génération d’intelligence artificielle développée par OpenAI, bouleverse déjà l’industrie audiovisuelle mondiale. Capable de générer des films complets à partir d’un simple script textuel, avec des personnages photoréalistes, des dialogues synchronisés et des voix naturelles, elle redéfinit la production visuelle. Mais cette prouesse technologique inquiète : réalisateurs, acteurs, doubleurs et techniciens redoutent une dématérialisation du cinéma et une disparition progressive des métiers humains.


Une IA qui “tourne” des films sans équipe

Contrairement à la première version de Sora, sortie en 2024, Sora 2 intègre désormais un module de synthèse vocale et émotionnelle avancée. Elle peut reproduire des intonations, respirations, hésitations, et adapter le jeu vocal selon le contexte d’une scène. Résultat : les doublages automatiques deviennent presque indiscernables des performances humaines. Les studios de production y voient un gain économique colossal : plus besoin de comédiens, de traducteurs, ni de directeurs artistiques pour les versions internationales.

Mais pour les professionnels du doublage, le risque est clair : l’IA ne se contente plus d’imiter, elle remplace.


Enjeux juridiques et éthiques

Sora 2 met en lumière des enjeux juridiques et éthiques majeurs liés à la création audiovisuelle contemporaine. La question de la titularité des droits sur les voix, les visages et les interprétations générés par intelligence artificielle demeure largement indéterminée. Se pose également le problème du clonage de la performance d’un acteur sans son consentement, notamment lorsque cette performance n’a jamais existé sous une forme réelle et identifiable. À cela s’ajoute la difficulté croissante de distinguer une œuvre cinématographique issue d’un processus humain d’un film synthétique entièrement ou partiellement généré par IA.

L’AI Act européen adopté en 2024 prévoit l’obligation de mentionner l’origine artificielle des contenus, mais les modalités concrètes d’application de cette exigence dans le secteur du cinéma restent floues. Face à cette incertitude, les syndicats d’acteurs et de doubleurs revendiquent la mise en place d’une étiquette obligatoire pour toute œuvre recourant à l’IA, ainsi qu’une extension du droit moral afin de protéger explicitement la voix et l’image des interprètes.




La réaction du secteur : entre fascination et résistance

En France, la Fédération des Artistes Interprètes (FAI) alerte sur un « risque d’extinction culturelle ». Les comédiens redoutent une standardisation des émotions et une uniformisation des voix : des personnages sans histoire, sans respiration humaine, calibrés pour l’efficacité plutôt que pour l’art. Certains réalisateurs refusent d’utiliser Sora 2, estimant que « le cinéma est d’abord un regard, pas un algorithme ». D’autres y voient au contraire un outil révolutionnaire, capable de réaliser des scénarios impossibles à tourner dans le monde réel, ou de redonner vie à des acteurs disparus.


Le danger pour le doublage : la disparition du lien humain

Avec Sora 2, les versions multilingues peuvent être générées automatiquement, sans adaptation culturelle ni direction artistique. Le système synchronise la voix du personnage à n’importe quelle langue, sans altérer le mouvement des lèvres. Résultat : les studios de postproduction sont menacés, et le métier de doubleur risque de devenir marginal. Déjà, certaines plateformes testent des séries « doublées intégralement par Sora », avec un label discret en bas d’écran.


Vers une nouvelle régulation ?

Un mouvement en faveur d’une nouvelle régulation se dessine progressivement au niveau européen afin de mieux encadrer l’usage des technologies d’intelligence artificielle dans la création artistique. Plusieurs propositions portées au sein du Parlement européen visent à renforcer la protection des artistes vocaux et visuels par la reconnaissance de la voix et du visage comme attributs constitutifs de la personnalité juridique. Elles prévoient également l’instauration d’une obligation de consentement écrit préalable à tout recours à un clone numérique, ainsi que la création d’un registre européen recensant les productions faisant appel à l’IA.

Si ces dispositifs pourraient contribuer à limiter les dérives et les usages abusifs, leur application pratique s’annonce délicate, notamment en raison de la dimension internationale des entreprises technologiques, dont une grande partie opère en dehors du territoire de l’Union européenne.

 
 
 

Posts récents

Voir tout

Commentaires


bottom of page